Après avoir rejeté sa mise sur le marché l’été dernier, l’Agence européenne du médicament (EMA) a finalement approuvé la prescription du lecanemab, également connu sous le nom commercial de Leqembi, pour les formes précoces de la maladie d’Alzheimer. Une décision saluée comme une percée significative après deux décennies de déceptions thérapeutiques.
Une avancée scientifique pour les formes débutantes de la maladie
En 2024, les espoirs autour du traitement de l’Alzheimer avaient été ravivés par cette nouvelle molécule développée par les laboratoires Eisai et Biogen, déjà autorisée aux États-Unis, au Japon et en Israël. Conçu pour cibler spécifiquement les formes débutantes ou légères de la maladie, le lecanemab repose sur une meilleure compréhension du rôle de la protéine amyloïde dans le cerveau.
Selon le Pr Mathieu Ceccaldi, neurologue à l’AP-HM et expert en Alzheimer, « ce traitement utilise un anticorps monoclonal qui neutralise la protéine amyloïde en se fixant dessus, avant de l’éliminer progressivement ». Toutefois, les effets du médicament se manifestent sur le long terme et ne visent pas à guérir la maladie, mais à ralentir sa progression.
Une décision controversée, puis révisée
L’EMA avait initialement refusé son autorisation en raison des risques associés, notamment des hémorragies et œdèmes cérébraux observés lors des essais cliniques. Cependant, après un réexamen approfondi, l’agence a changé d’avis, concluant que « les bénéfices l’emportent sur les risques », mais seulement pour une population restreinte de patients.
Pour le Pr Ceccaldi, cette autorisation représente une avancée prudente mais essentielle :
« C’est une décision très importante et raisonnable, qui marque une étape majeure dans la prise en charge de l’Alzheimer, tout en tenant compte des risques potentiels. »
Une utilisation encadrée et réservée
Ce traitement sera réservé aux patients au début de la maladie, avec des attentes réalistes : il ne guérit pas, mais peut ralentir la progression. Après 18 mois de traitement, les données suggèrent un gain d’environ 4 mois de ralentissement du déclin cognitif. Malgré ces résultats, le traitement impose des contraintes, notamment des effets secondaires potentiels, qui nécessiteront une évaluation personnalisée des bénéfices et des risques.
« Chaque patient éligible devra prendre une décision réfléchie, basée sur une évaluation médicale approfondie et un dialogue avec son médecin, » souligne le spécialiste.
Un futur encore en construction
L’autorisation européenne n’est qu’une étape. Les autorités nationales, telles que la Haute Autorité de Santé (HAS) en France, doivent encore statuer sur les modalités de remboursement et d’intégration de ce traitement dans les systèmes de santé.
« Les spécialistes doivent dès à présent se préparer à l’arrivée de ce médicament, et à celle d’autres traitements prometteurs dans les années à venir. C’est un défi majeur pour la prise en charge de l’Alzheimer, » conclut le Pr Ceccaldi.
Ce feu vert marque un tournant dans la lutte contre Alzheimer, tout en ouvrant la voie à de nouvelles perspectives thérapeutiques.