Le moteur de recherche français, qui garantit la confidentialité des données de ses utilisateurs, est passé d’une croissance de 20 % par mois à près de 20 % par jour en mars. Davantage sollicité que d’habitude, il a même subi une panne géante le 28 mars due au nombre de requêtes élevé.
Une prise de conscience ? Les ennuis de Facebook et de l’entreprise Cambridge Analytica , qui aurait récupéré sans leur consentement les données de 87 millions d’utilisateurs du réseau social , ont poussé certains internautes à se tourner vers des services plus respectueux de la vie privée. A l’instar du moteur de recherche français Qwant, qui tente de tenir tête à Google depuis 2013 en assurant ne pas enregistrer les données personnelles de ses utilisateurs ni les suivre à la trace.
Alors que la start-up enregistrait depuis le début de l’année 20 % de croissance mensuelle, son activité a bondi jusqu’à 18 % par jour en mars. Qwant a atteint les 60 millions de visites par mois. Le 28 mars, ses infrastructures d’hébergement et ses serveurs n’ont d’ailleurs pas été en mesure de gérer le trop grand nombre de requêtes, inhabituel, entraînant une panne de plus de six heures.
Devenir une alternative crédible
Cette tendance pourrait se poursuivre alors que les scandales autour de la vie privée en ligne se multiplient. Début avril, l’application de rencontres gay Grindr était sous le feu des critiques pour avoir partagé les informations personnelles de ses 3,6 millions d’utilisateurs actifs quotidiens avec deux prestataires : leurs coordonnées, localisations, mais aussi leur sérologie et la date de leur dernier dépistage VIH.
« De plus en plus de gens commencent à se rendre compte de ce que les géants de la Toile ont fait jusqu’à présent et ça fait du bien », commente Eric Léandri, fondateur et PDG de Qwant. Ce dernier compte également sur l’entrée en vigueur le 25 mai dans l’Union européenne du règlement général sur la protection des données (RGPD) pour voir croître ses parts de marché.
Qwant rassemblait l’an dernier 4 % des recherches en France, bien loin derrière Google, en situation de quasi-monopole (93 %), selon une enquête Ifop . La société française est également présente en Allemagne, en Espagne et en Italie, où elle est en forte croissance. L’ambition d’Eric Léandri n’est pas de mettre KO le géant américain, mais de parvenir à s’imposer comme une alternative respectueuse de la vie privée. « Si on parvient à faire de 5 à 10 % du marché européen, on devient une alternative crédible », indique Eric Léandri.
« Nous avons enregistré 8,5 milliards de requêtes sur l’année 2017. Dérisoire comparé à Google, mais en 2016 nous enregistrions seulement 2,8 milliards de requêtes », se réjouit le patron de Qwant, qui emploie désormais 160 personnes contre 55 l’an dernier.
2018, une année charnière
La start-up avait levé 18,5 millions d’euros auprès de la Caisse des Dépôts et d’Axel Springer en 2017. A cette somme s’ajoutent les 25 millions d’euros décrochés sous forme de prêt auprès de la Banque européenne d’investissement. Le moteur tire des revenus de la publicité en ligne, de partenariats et de son onglet « shopping ». Qwant dit engranger environ 12 euros par an et par utilisateur.
2018 est une année charnière. Au-delà du RGPD, la jeune pousse, qui propose déjà un moteur de recherche adapté aux enfants, Qwant Junior, a prévu de lancer une pléthore de nouveaux services. La recherche commence à se thématiser, d’abord avec un onglet « musique », et prochainement un onglet « jeu vidéo ».
Qwant Maps et Qwant Pay arrivent
En outre, un service de messagerie doit être lancé ce mois-ci, avant le déploiement d’un service de paiement en ligne Qwant Pay et d’un service de cartographie Qwant Maps, tous deux respectueux de la vie privée. Et pour permettre aux utilisateurs de personnaliser leur expérience sans subir d’intrusion, l’entreprise va bientôt lever le voile sur l’outil Masq : au lieu d’être stockées sur ses serveurs, les données des internautes pourront être enregistrées sur leur ordinateur ou leur mobile.
En attendant, Qwant multiplie les points d’entrée pour habituer le public à son moteur de recherche, à travers des partenariats avec des médias en ligne, des sites institutionnels comme France.fr ou encore des académies.